Issu d’une famille juive d’origine d’Europe de l’Est, Gérard Zlotykamien est né à Paris en 1940. Séparé de ses parents à l’âge de 2 ans, il échappe de peu à la déportation mais se retrouve placé dans une famille d’accueil peu recommandable jusqu’à la fin de la guerre. À la Libération, il retrouve son père et sa mère, pratiquement les seuls survivants de la famille. Les autres sont restés dans les camps. Cette violence, l’injustice et la perversité du monde le marque à jamais. Toute sa vie, il sera hanté par ces victimes innocentes. Que ce soit Hiroshima, les génocides, le Vietnam, l’Apartheid, des attentats ou la guerre en Ukraine, à chaque fois l’artiste est intimement atteint dans sa chair. Pourquoi l’humanité a tant besoin de se détruire ?
En 1963, il décide que l’espace public sera désormais son espace d’expression, un terrain de jeu totalement vierge à l’époque et qui lui semble dépourvu de toute censure. Sans le savoir, il porte ainsi sur les fonts baptismaux ce qui deviendra le Street Art. Dans les rues il trace avec frénésie ses figures évanescentes qu’il nomme « Éphémères ». Selon chacun, elles peuvent être des ombres, des souvenirs, des hommages, des fantômes, ou tout à la fois.
Opérant à visage découvert, Gérard Zlotykamien ne s’est jamais caché. Il ne s’est jamais montré non plus. Discret, il s’est longtemps attaché à éviter le milieu artistique, les médias et les mondanités. C’est donc un homme pudique et mystérieux qui a influencé et inspiré des générations entières d’artistes.
Depuis plus de 60 ans, l’œuvre de Gérard Zlotykamien n’a cessé d’évoluer. Sur les murs lézardés de lieux abandonnés ou voués à la destruction, sur des matelas, des cartons ou toute sorte d’encombrants, ses Éphémères nous rappellent le caractère fragile et fugace de l’existence, rapportant toutes les formes possibles d’effacement et de disparition.
En janvier 2024, le Centre Pompidou a franchi une étape historique en intégrant le monde de l’art urbain à sa vaste collection. Ce sont 8 oeuvres de Gérard Zlotykamien qui ont été choisies, pour inaugurer cette nouvelle orientation artistique.